Si le proche que vous accompagnez a plus de 75 ans, il prend probablement des médicaments. En effet, plus de la moitié des personnes âgées de plus de 75 ans présentent au moins une affection longue durée (ALD), c’est à dire une pathologie chronique (source : Haute Autorité de Santé).
Connaissez-vous le mot « Iatrogénie »?
L’Organisation Mondiale pour la Santé le définit ainsi :
Toute réaction nocive et non recherchée liée à la prise d’un médicament et survenant de façon fortuite.
OMS
Chaque année la iatrogénie est responsable de nombreuses hospitalisations de personnes âgées. Or une partie de ces hospitalisations pourraient être évitables en faisant une bonne utilisation des médicaments.
C’est pourquoi cette semaine nous allons vous expliquer :
- Pourquoi les personnes âgées sont plus concernées par la iatrogénie
- Quelles en sont les manifestations possibles
La semaine prochaine, nous vous donnerons des règles de bon usage des médicaments pouvant limiter ce risque de iatrogénie.
C’est parti !
I. Médicaments : quelles sont les particularités des personnes âgées ?
1. Des facteurs de risque liés à l’âge
A. La polypathologie
57 % des personnes âgées de 75 ans et plus ont au moins 1 affection de longue durée (ALD), 40 % ont au moins 2 ALD, 3,6 % au moins 3, et 0,8 % au moins 4.
Haute Autorité de Santé, avril 2015
Qui dit polypathologie dit aussi polymédication : c’est le fait de consommer plusieurs médicaments.
Selon les analyses de la cohorte PAQUID, en France, parmi les patients âgés de plus de 65 ans, le nombre moyen de médicaments déclarés par personne est de 4,1 !
B. Des modifications physiologiques
Avec l’âge, certains organes impliqués dans l’élimination des médicaments comme le foie ou les reins peuvent fonctionner de façon moins performante que chez un sujet jeune. Ceci peut aboutir à une accumulation de résidus médicamenteux responsables de l’apparition d’effets indésirables.
De la même façon, un transit un peu plus long voire une constipation peut avoir des conséquences sur les quantités de médicaments qui passent dans l’organisme.
C. Des atteintes pouvant gêner la bonne compréhension
Avec l’âge, les fonctions sensorielles comme l’ouïe ou la vue peuvent être altérées. Ceci peut avoir un impact négatif sur la compréhension des consignes orales ou écrites pour la prise des médicaments.
Pour la vue, ceci peut aussi rendre difficile la reconnaissance des médicaments.
Si on associe en plus à cela une moins bonne dextérité pour manipuler les médicaments (par exemple les plaquettes de comprimés), la préparation de son traitement peut vite devenir un casse-tête pour votre proche !
Les atteintes des fonctions cognitives, comme dans la maladie d’Alzheimer, peuvent aussi être sources d’incompréhension et d’erreurs médicamenteuses.
2. Des facteurs de risque environnementaux et sociaux
De nombreux facteurs environnementaux et sociaux peuvent avoir une influence sur le risque iatrogène chez les personnes âgées. Citons entre autres :
- L’isolement social et géographique
- La perte d’autonomie nécessitant le recours à une personnes tierce
- Le changement de mode de vie (Domicile/Hospitalisation/EHPAD)
- Les conditions climatiques extrêmes. On pense bien sûr aux épisodes de canicule mais il ne faut pas oublier les épisodes de grand froid (voir ICI)
II. Quelles sont les manifestations fréquentes de la iatrogénie ?
Chez les personnes âgées, le repérage de ces signes n’est pas toujours évident car la symptomatologie peut être atypique. De plus, les symptômes sont parfois difficiles à différencier des symptômes de la (ou des) maladie(s) initiale(s) elle(s)-même(s) ou de ses (leurs) complications.
Quelles sont les manifestations qui doivent vous faire évoquer une possible origine médicamenteuse ?
1. Une manifestation cutanée
On appelle une manifestation cutanée liée à un médicament une toxidermie. De nombreux médicaments peuvent provoquer des réactions cutanées, mais citons en particulier dans les médicaments d’utilisation courante les antibiotiques et les anti-inflammatoires.
Les symptômes cutanés sont variables :
- Petits boutons ou plaques rouges
- Urticaire (cela ressemble à des piqûres d’ortie)
- Photosensibilisation (Les manifestations cutanées apparaissent après une exposition au soleil. Il peut s’agir par exemple d’une phototoxicité qui donne un énorme « coup de soleil » pour une exposition solaire moindre. La photosensibilisation peut être aussi de type photoallergie, comme de l’eczéma)
- Oedèmes
- Bulles
- …
2. Une confusion aiguë
Elle doit être évoquée si votre proche âgé présente un changement rapide de son comportement habituel.
Voici quelques exemples de ce que l’on peut voir dans une confusion aiguë :
- Brutalement votre proche ne sait plus qui il est, comment vous vous appelez.
- Il est désorienté dans le temps et dans l’espace
- Ses propos sont incohérents
- Il a des hallucinations
- Il est agité et anxieux ou au contraire stuporeux
Ça peut être difficile de repérer une confusion chez un patient qui souffre de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée (et en particulier de la maladie à corps de Lewy). Pourtant ces patients ont un risque accru de confusion. Si votre proche a l’une de ces maladies, pensez à la confusion en cas de modification brutale de la vigilance ou du comportement !
3. Des malaises ou des syncopes
Le terme de malaise n’est pas très médical (on parle plutôt de lipothymie). Il s’agit d’une sensation angoissante d’évanouissement imminent qui peut s’accompagner d’autres signes comme une pâleur, des palpitations, un flou visuel, une hypersudation… Il n’y a pas de perte de connaissance.
Au contraire, une syncope est une perte de connaissance brutale et brève liée à une hypoperfusion cérébrale.
4. Des chutes à répétition
Parfois, il n’est pas facile de mettre en évidence les malaises et les syncopes. Un signe indirect peut être la chute. En effet, les malaises, les sensations de vertige et les syncopes sont de grands pourvoyeurs de chutes !
5. Des signes digestifs
De nombreux médicaments peuvent donner des effets secondaires digestifs à type de nausées, vomissements, troubles du transit, hépatite.
6. Une diminution de l’appétit et une perte de poids
Soyez vigilant à ces deux signes car ils peuvent être les premiers marqueurs d’une dénutrition. Or chez les personnes âgées, la dénutrition n’est pas sans complication (nous vous en avions parlé dans cet article ICI)
Vous savez maintenant pourquoi les personnes âgées sont plus sensibles aux médicaments. La semaine prochaine, nous vous donnerons des règles de bon usage pour limiter le risque de iatrogénie.
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Nous vous souhaitons une agréable semaine et surtout, prenez soin de vous !